Lorsqu’une marchandise suspectée de porter atteinte à un droit de propriété intellectuelle, et notamment une marque enregistrée, est interceptée par les douanes européennes, le titulaire de ce droit, ou son mandataire, est informé. Son mandataire reçoit une notification d’action douanière d’office, par email.
Cette situation a lieu particulièrement lors d’importations depuis des plateformes de production hors UE.
1. Pourquoi les douanes interviennent-elles d’office ?
Les autorités douanières peuvent intervenir de leur propre initiative (ex officio) lorsqu’elles identifient des marchandises suspectes, même si le titulaire de droits ne les a jamais sollicitées en ce sens.
L’objectif est clair : empêcher la mise en libre circulation de produits contrefaisants avant qu’ils ne pénètrent le marché européen.
Dans ce cadre, les douanes suspendent la mainlevée ou retiennent les marchandises et notifient rapidement le titulaire des droits concernés. Le Règlement (UE) n° 608/2013 le prévoit.
2.Les délais impératifs pour agir
À compter de la notification émise par les douanes, le titulaire du droit dispose de quatre jours ouvrables pour déposer une demande d’intervention ponctuelle.
Cette demande doit être transmise via le Portail européen de l’application des droits de propriété intellectuelle (IPEP), géré par l’EUIPO, administration européenne des marques et dessins et modèles.
En l’absence de dépôt dans le délai imparti, les marchandises sont libérées, même si elles sont manifestement contrefaisantes.
3. Les éléments à fournir dans la demande d’intervention
La demande d’intervention douanière doit permettre à l’administration de vérifier la titularité du droit et d’identifier les marchandises suspectes. Il convient de lui adresser notamment les éléments distinctifs des produits authentiques (codes-barres, différences techniques, micropuces RFID / NFC, encres ou pigments invisibles, numéros de série gravés ou estampillés ; visuels comparatifs entre originaux et copies), les informations pouvant être connues sur les marchandises suspectes (origine, importateur, canal de distribution, itinéraire).
4. Confirmation et destruction des marchandises
Dans les 10 jours ouvrables suivant la notification (ou 3 jours pour des produits périssables), le titulaire doit confirmer par écrit qu’il est convaincu de l’atteinte à son droit, et qu’il accepte la destruction des marchandises.
Si le déclarant (importateur) ne s’y oppose pas, les produits sont détruits sous contrôle douanier, sans qu’il soit nécessaire de saisir le juge.
En revanche, s’il refuse expressément la destruction, le titulaire doit engager une action civile dans un délai de 10 jours (prolongeable une fois de 10 jours).
5. Le rôle de l’avocat en propriété intellectuelle
L’avocat spécialisé en propriété intellectuelle analyse la notification douanière, déposer la demande d’intervention dans les délais, coordonner les échanges avec les autorités douanières, et engage l’action judiciaire devant le Tribunal judiciaire spécialisé, en cas de contestation de la destruction.
Cette réactivité est déterminante pour empêcher la libération des produits contrefaisants et préserver la valeur de votre marque.
La vigilance douanière constitue un outil stratégique de lutte contre la contrefaçon. Elle complète les procédures classiques d’opposition, de saisie-contrefaçon ou d’action en contrefaçon devant les tribunaux.
Coraline Favrel, avocat associé au Barreau de Lille, Spécialisée en propriété intellectuelle, stratégie et procédures