La célèbre plateforme de musique en ligne vient d’être condamnée par le Tribunal judiciaire de Paris, qui rappelle un principe bien établi en matière de droit d’auteur. Pour être valable, une licence doit être précise quant aux contenus concédés et aux exploitations autorisées.
La licence mondiale, gratuite et perpétuelle des utilisateurs à la société californienne, mentionnée au sein des conditions générales du service de streaming audio d’Apple est illicite, et réputée non écrite.
Après avoir soumis les conditions générales d’utilisation de Twitter, Facebook, puis Google, aux juridictions compétentes, l’association française UFC Que-Choisir s’en prenait aux services iTunes et Apple Music, par assignation du 2 juin 2016, et ce, conformément à ses compétences prévues au sein de l’article L.621-7 du Code de la consommation.
Cette instance se clôturait par un Jugement du Tribunal judiciaire de Paris du 9 juin 2000 qui, une fois la clause illicite détectée, condamnait la société Apple Distribution International notamment au paiement de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts, 10.000 euros au titre de l’article 700, aux entiers dépens, et surtout à la publication de la décision, afin que l’ensemble de ses abonnés français puissent lire intégralement ledit jugement par l’insertion d’un lien hypertexte sur la page d’accueil du site du service Apple Music ainsi que sur celle de ses applications sur tablettes et téléphones mobiles, et ce pendant une durée de 3 mois, dans les trente jours à compter de sa signification ; ladite condamnation étant assortie d’une peine d’astreinte de 3.000 euros par jour de retard.
La plateforme de streaming, aux 60 millions d’abonnés, née en 2015 et aujourd’hui disponible dans 167 pays, mentionnait : « Vous concédez par les présentes à Apple une licence mondiale, gratuite, perpétuelle et non-exclusive pour utiliser les éléments que vous soumettez dans les services et à des fins marketing. Apple peut contrôler et décider de supprimer ou de modifier tout élément envoyé. »
Or, les articles L.131-2 et L.131-3 du Code de la propriété intellectuelle imposent que les droits faisant l’objet d’une licence de droit d’auteur soient énumérés précisément, ainsi que l’étendue, la destination, le lieu et la durée de leur domaine d’exploitation. La clause d’Apple stipule que l’abonné accorde à la société une licence mondiale, gratuite, perpétuelle pour utiliser, des « éléments », que l’utilisateur soumettrait dans les services ; lesdits « éléments » étant susceptibles de comprendre des textes, photos et des vidéos protégés par droit d’auteur. Cette disposition ne respecte pas la précision exigée par la loi. Illicite au regard de la propriété littéraire et artistique, elle est, au regard du Code de la consommation, réputée non écrite.
Une telle décision devrait encourager les rédacteurs des conditions générales des applications Spotify, Deezer, Amazon Music, Tidal ou encore Qobuz à réviser les leur, afin de les rendre conforme au droit de la propriété intellectuelle français, si ce n’est déjà fait.
Conseil pratique :
Assurez-vous de la licéité de vos conditions générales au regard de la législation protégeant les consommateurs que vous visez.
Coraline Favrel, https://carmen-avocats.com/coraline-favrel/