L’article en entier, du 22 février 2020, de Rafaële Rivais, se trouve sur ce lien :
« Voilà sept ans que le Crédit Mutuel Nord Europe suspecte l’un de ses clients, Manuel F. de mensonge. Lorsqu’en mai 2013 celui-ci se plaint de retraits frauduleux (5 390 euros) sur ses comptes, son agence d’Hellemmes (Nord) lui répond qu’il a nécessairement été victime d’ « d’hameçonnage », procédé qui conduit les clients à divulguer leurs données confidentielles sur des sites imitant celui de la banque. Non seulement elle ne le rembourse pas mais, en plus, elle lui prélève 700 euros de frais liés à son découvert, et l’inscrit sur le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, ce qui lui interdit d’obtenir le prêt immobilier dont il a besoin.
Les tribunaux devant lesquels leur litige est porté lui rappellent pourtant tous qu’elle doit « prouver » la négligence de son client. Faute pour elle d’y parvenir, ils la condamnent à le rembourser. Le 3 septembre 2015, la cour d’appel de Douai y ajoute même le remboursement des frais, ainsi que le paiement de 1 000 euros de dommages et intérêts, pour le « préjudice moral » lié au fichage.
Sa décision est publiée sur des sites juridiques et l’Association française des usages de banques (AFUV) en fait victorieusement état sur sa page Facebook, en novembre 2016. Las, elle l’introduit en expliquant que « la victime avait été conduite, via un courriel frauduleux, vers un site qui imitait celui de la banque… », ce que Manuel F. a toujours nié.
Pour le Crédit mutuel, il va de soi que l’AFUB tient cette information du jeune homme, qui aurait donc menti aux juges. D’ailleurs, celui-ci n’a-t-il pas rédigé son premier courriel en utilisant l’un des modèles de lettre que l’AFUB propose sur son site ? Son agence assigne Manuel F. en « révision de l’arrêt du 3 septembre 2015, pour fraude ». Elle ne prend pas la peine, au préalable, de vérifier les circonstances dans lesquelles la publication sur Facebook a été rédigée. C’est Me Coraline Favrel, l’avocate de Manuel F. qui s’en charge. Le secrétaire général de l’association, Serge Maitre, lui répond que le post sur le réseau social « ne se réfère qu’à des éléments du texte [de l’arrêt] », et que l’AFUB n’a « jamais eu à connaître » le dossier de M. F. qui ne « fait pas partie de ses adhérents ».
Forte de cette pièce décisive, Me Favrel demande que la caisse du Crédit mutuel soit condamnée à verser 1 000 euros de dommages et intérêts à son client pour procédure abusive. La cour d’appel de Douai lui donne satisfaction, en jugeant que la caisse a « agi avec une légèreté blâmable » ; ce que confirme la Cour de cassation, le 8 janvier 2020 : faute de preuves de « manoeuvres » (fausses pièces) « destinées à corroborer le mensonge », le recours de la banque était « abusif ». »